Christiane Collange: « Pitié pour vos rides », une pinte de bon… sens

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J’ai lu plusieurs des livres de Christiane Collange. Et j’ai toujours été enchantée par son bon-sens, son franc-parler, son regard parfaitement lucide sur la vie et les rôles que nous y tenons.
Aussi ai-je demandé en service de presse son dernier ouvrage: « Pitié pour vos rides, une enquête vérité sur le monde de l’esthétique ».
Je l’ai lu d’une traite.
Bien sûr, de nombreuses émissions de télévision et des articles ont déjà traité le sujet.
Mais les émissions et les magazines passent tandis que les livres restent.
Il fallait qu’une voix s’élève pour exprimer clairement, après enquête minutieuse, le pourquoi du malaise qui pousse certaines femmes à passer entre les mains des chirurgiens esthétiques, les risques encourus etc.

Le pamphlet de l’ancienne rédactrice en chef de l’Express est percutant. Il aborde de manière très complète les tenants et les aboutissants de ce phénomène très révélateur d’un malaise profond. Il fallait la plume énergique et ferme de Christiane Collange pour le faire.

Après avoir lu son ouvrage, j’ai déposé une demande d’interview par téléphone.
Et hier matin, la rencontre a eu lieu, riche et drôle.
Je vous en livre ici l’essentiel en espérant qu’elle vous incitera à découvrir ce livre, si ce n’est pas déjà fait…

– Vous vous êtes penchée sur les raisons profondes qui poussent les femmes à se faire refaire le visage ou le corps. Vous parlez de l’emploi, de l’image qu’elles renvoient et qu’elles ne supportent plus, du rôle de la télévision, et des médias etc… Pensez-vous qu’il soit plus difficile d’être femme aujourd’hui qu’il y a 50 ans?
Non, pas du tout. Il y a 50 ans, tout était très difficile pour les femmes. Il faut faire la distinction entre « être femme » et le domaine de la séduction. Il est nettement plus facile d’être femmes aujourd’hui, car elles jouissent de plus de liberté, ont davantage le choix de leur destin. Mais dans le domaine de la séduction, c’est une autre affaire. On nous fait croire que, pour séduire, il faut être une beauté. C’est faux, mais c’est le message véhiculé par les médias, la publicité.

– Vous n’êtes pas tendre avec les médias sur ce point…
Autrefois, la presse féminine aidait les femmes à assumer leur quotidien, leurs enfants, leur ménage. Aujourd’hui, elle est faite pour fabriquer des cover-girls. Grâce à Dieu on réagit. Ne vous laissez pas influencer par ces messages faussés.
Tenez, prenons un exemple: on veut nous faire croire que toutes les femmes enceintes de huit mois sont magnifiquement belles et bien dans leur peau. On nous a balancé Angelina Jolie enceinte et divine. On a oublié de nous dire qu’elle devait avoir un coiffeur, un maquilleur, un nutritionniste et que sais-je encore derrière elle chaque jour. La réalité ne ressemble pas à cela. Lorsque nous sommes enceintes de huit mois, nous sommes fatiguées, et nous n’attendons qu’une chose: que cela finisse et que l’enfant naisse!

– Vous estimez aussi que les reality show devraient être interdits car ils diffusent une « idéologie sinistre et dangereuse » à la gloire de poupées entièrement factices. Votre voix s’élève comme une voix de bon sens et de sagesse dans un monde où, finalement, ce genre de pratique semble rentrer tranquillement dans les mœurs et ne pas susciter beaucoup de réaction en regard de la gravité de ce qu’ils véhiculent. Cela vous inquiète?
Oui. Les reality show devraient être interdits. Il donne comme but aux femmes de perdre la réalité de leur vie. Certaines émissions les poussent à se faire entièrement refaire le visage et le corps. Mais on ne nous dit pas ce qui leur arrive ensuite. Peut-être deviennent-elles folles? Peut-être leurs enfants ne les reconnaissent-ils plus? Et comment réagissent leurs maris devant une femme qui ne ressemble plus à celle qu’ils ont épousée?

— L’un de vos chapitres est d’une sagesse percutante: il est impossible de rajeunir en vieillissant et vous proposez une série de conseils pour vivre mieux les ravages du temps. Parmi eux: préserver son capital peau. Et vous donnez 10 conseils d’une simplicité désarmante et qui ne coûtent rien. Vous les suivez vous même? 
Oui! Il est fondamental de bien se dire que quoi que l’on fasse, on ne rajeunit pas. Quelqu’un m’a dit un jour cette phrase très vraie: « Quand on se fait injecter du Botox, on ne fait pas plus jeune, on fait botoxée! ». Les conseils que j’indique sont des principes de base. Il faut prendre soin de sa peau, tout simplement. Pour ma part, j’ai la chance de brûler au soleil! Cela me désespérait quand j’étais jeune. Mais aujourd’hui, l’avoir fui m’arrange bien: ma peau a été préservée, elle n’est pas très abîmée pour mon âge.

– Vous vous êtes attaquée, dans vos livres, à deux des pires tabous pour la femme: le poids et l’âge. Il faut se sentir très bien dans sa peau pour oser le faire de cette façon… 
Et non, justement… Je me sens bien dans ma personne, mais mal dans ma peau. Je ne me suis jamais trouvé jolie. Mais je suis très à l’aise dans mon personnage, dans ma tête. J’ai eu une vie passionnante. J’ai plein d’enfants et de petits-enfants, avec pleins d’emm… comme tout le monde. J’ai eu une vie professionnelle formidable. J’ai de quoi me sentir bien.

— Vous même, comment appréhendez-vous la question de l’âge dans votre quotidien? 
Un jour, il y a longtemps, j’ai regardé mes cheveux queue de vache, plutôt châtains, mes yeux verts, ma peau claire et mes taches de rousseur et je me suis rendue à l’évidence: j’aurais dû être rousse. Donc, j’ai commencé à me teindre les cheveux. Et puis l’an passé, je suis tombée malade et je me suis vue. J’étais une vieille femme malade avec des cheveux roux. J’ai décidé que j’allais arrêter de me teindre et assumer mes cheveux blancs. Depuis, mes cheveux, qui devaient en avoir assez des traitements que je leur imposais, vont beaucoup mieux. Et, bizarrement, on me dit que mes cheveux blancs me rajeunissent! C’est un comble… L’âge… Pour ce qui est de ma figure, j’appréhende bien. Pour mes genoux, moins! Les vieilles dames comme moi, de bonne humeur et actives doivent faire beaucoup d’efforts. Car nous sommes forcément handicapées par les ans. Il n’y a pas un jour où vous n’avez pas mal quelque part! Mais une bonne douche et un bon café vous permettent de vous remettre en train!

– Vous avez une sagesse, une façon de regarder la vie avec un œil à la fois critique et tolérant qui fait un bien fou à vos lecteurs. D’où vous vient ce bon-sens

De mon père. Je lui ressemble beaucoup. Il avait un grand sens du quotidien, de la vie. La vieille de sa mort, nous avons eu un fou rire magnifique, tous les deux. Ma philosophie ressemble à la sienne: la vie est une chose difficile, il ne faut pas en rajouter! Mais vous savez, je ne suis pas commode. Je suis très autoritaire, je suis une grosse bosseuse et très rigolote. Lorsque j’étais rédactrice à l’Express, j’étais très exigeante sur la qualité du travail. Et j’ai été pareille avec mes enfants; Je suis drôle, mais on ne plaisantait pas avec les études, les choses à faire. Je ne supporte pas le laisser-aller, la paresse, tout ce qui est mou. La vie est une chose dont il faut s’occuper activement

– Avez-vous des contacts avec vos lecteurs? Comment réagissent-ils à votre livre?
Oui, j’ai beaucoup de contacts avec…. les lectrices! Car je suis un auteur pour les femmes. J’ai peu d’hommes parmi mon lectorat, ou alors des maris auxquels leurs femmes ont lu un chapitre d’un livre. Beaucoup de gens pensent ce que je dis et sont ravis que quelqu’un le dise à leur place. Il y a une prise de conscience de l’autonomie des femmes.

– En travaillant sur votre ouvrage, avez-vous eu accès aux statistiques? Sait-on quel pourcentage de femmes font appel à la chirurgie esthétique?
Oui: elles sont moins de 10% à le faire, et moins encore à franchir le pas. Et ce surtout parce que cette chirurgie est très chère et qu’elle est réservée à une élite. Attention: je fais bien la différence avec la chirurgie réparatrice qui, elle, est vraiment utile. Tout comme la démarche d’une femme qui souffre toute sa vie d’avoir un nez démesuré et qui se fait opérer est tout à fait légitime.

– Un chiffre aussi modeste méritait-il vraiment un livre sur le sujet?
Oui, car la majorité de la population en est le témoin à travers la TV, les médias le cinéma etc. Et cela rend des femmes malheureuses. Elles se disent: Toutes ces femmes là ne vieillissent pas… et moi!?

— Et les hommes? Passent-ils eux aussi par le bistouri du chirurgien esthétique?
Moins que les femmes, mais cela commence un peu. Ils se font eux aussi refaire le visage, la plupart du temps pour des raisons professionnelles. Certains, à 50 ans, ne veulent pas avoir l’air vieux au milieu de l’équipe de jeunes dont ils sont responsables. Personnellement, je pense que cela ne sert à rien.

– Quels sont vos projets, aujourd’hui que votre dernier livre vit sa vie?
Je ne parle jamais des livres que j’ai sur le feu… pour éviter que l’on ne me prenne l’idée en route! J’écris tous les deux ans. Je vais accompagner ce livre-ci, puis je me remettrai au suivant dès la fin de l’année.

Martine Bernier

« Pitié pour vos rides » Christiane Collange, Ed. Robert Laffont

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