Le vent et la corneille

Lorsque je suis arrivée dans les nouveaux quartiers, voici un mois, l’un de mes voisins m’a dit que, ici « les orages claquent ».
J’ai eu l’occasion de m’en rendre compte à trois reprises déjà.
Et comme j’aime toujours autant tempêtes et orages, je me suis régalée.
Ce matin, Pomme et moi avons très vite constaté, en nous levant, que la journée signerait le retour de la pluie.
Visiblement, cela l’a mise en joie.
Tandis qu’elle courait comme une gazelle sur la pelouse autour de la maison, j’ai regardé le ciel.
Gris et noir, lourd, découpé par les basses montagnes sombres, avec des nuages si bas qu’il nous empêche de voir les Dents du Midi et les grands sommets.
Je me suis mise à mon clavier tôt pour avancer dans mon travail.
Porte-fenêtre ouverte sur le balcon, ce sont des conditions rêvées pour travailler, au-milieu des chants d’oiseaux.
C’est à ce moment que le vent s’est levé.
Un souffle continu, fort, qui remue depuis plus d’une heure les branches des arbres autour de la maison, qui fait claquer les drapeaux dont mon voisin est si fier.
Des bruits que j’aime…
Je tapais mon article en écoutant le vent, quand, tout à coup, j’ai entendu un coassement et j’ai vu Pomme filer vers le balcon et s’asseoir juste à la sortie de mon bureau.

Elle était revenue…

Elle, c’est une corneille qui, depuis deux jours, visite notre terrasse.
La première fois, elle s’est posée sur la rambarde.
Pomme a aussitôt essayé d’aller la voir de plus près, prudemment.
Elle s’est envolée lorsqu’elle m’a vue.
Hier soir, même scénario.
Elle s’est perchée à l’extrémité du balcon, regardant Pomme qui s’est assise et l’a observée un long moment.
Ce matin, son cri a été comme un appel.
Pomme y a répondu aussitôt en filant sur les lieux.
Pas d’agressivité, chez elle, une simple curiosité appuyée.
Je me suis approchée doucement, et suis restée à l’intérieur du bureau, de manière à pouvoir voir l’oiseau sans l’effrayer.
Est-ce toujours le même?
Je n’en sais rien: rien ne ressemble plus à une corneille qu’une autre corneille.
Elle penchait la tête, examinait le contenu du balcon avec de petits geste saccadés.
Elle semblait ne pas perdre Pomme de vue, la guettant de ses petits yeux noirs, ronds comme des têtes d’épingle.
Pomme s’est levée et a fait deux pas vers elle.
Elle n’a pas cherché à partir.
La scène a duré deux ou trois minutes, puis elle s’est envolée.
Pomme s’est retournée vers moi, comme pour me prendre à témoin.
La veille, je l’avais emmenée sur un article où elle m’attendait une jeune femme vivant avec un molosse, un deuxième chien croisé beauceron et… un pigeon qui la prenait pour sa mère.
Parfaitement apprivoisé et habitué aux chiens qui ont plutôt tendance à le craindre, il s’est approché de Pomme ahurie, et lui a picoré la truffe.
Mon Mogwaï a fait un saut en arrière.
Depuis, elle regarde les oiseaux avec curiosité et… prudence.

Ce qui ne l’empêche pas désormais, dès qu’elle entend le cri caractéristique d’une corneille, de filer sur la terrasse et d’attendre, le nez en l’air…

Martine Bernier

 

 

 

 

 

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