Denise Bombardier: Vieillir avec grâce

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Voici quelques semaines, j’avais parlé d’une interview marquante que je venais de terminer.
Aujourd’hui qu’elle a été publiée, je peux me permettre de la rediffuser ici dans son intégralité.
Il s’agit de celle de Denise Bombardier, célèbre journaliste canadienne qui partage son temps entre le Québec, la Californie et la France.
Je l’ai interrogée à l’occasion de la sortie de son dernier livre: « Vieillir avec grâce ».

 

« Vieillir avec grâce », tout un art…

 

Dans l’univers des médias francophones, la journaliste canadienne Denise Bombardier  est une vedette.
Née en 1941, cette intellectuelle aux opinions courageuses et au caractère bien trempé a fait carrière à la télévision canadienne où elle a animé durant trente ans des émissions politiques, scientifiques et culturelles. Elle a également collaboré à des journaux et magazines comme l’Express, le Monde et le Point, tout en menant une carrière d’écrivain et de parolière.
Son combat pour la défense de la langue française lui a valu de devenir Officier de la Légion d’Honneur et Chevalier de l’Ordre National du Mérite.

Aujourd’hui, toujours collaboratrice du Journal de Montréal, Denise Bombardier partage sa vie entre la Floride, le Canada et la France, et vient de publier son vingt et unième ouvrage: « Vieillir avec grâce ». Rencontre.

–       Dans cet ouvrage, vous relevez combien homme et femmes sont inégaux devant la vieillesse…
Oui. Chez un homme, prendre des rides, avoir des cernes sous les yeux et un visage de plus en plus buriné est considéré comme un charme supplémentaire. Nous connaissons tous des hommes devenus beaucoup plus beaux avec l’âge qu’ils ne l’étaient lorsqu’ils avaient vingt ans! Chez la femme, c’est l’inverse. Les rides et les signes de l’âge sont mal vus.

–       Ce qui ne vous empêche pas de souligner que les hommes supportent beaucoup moins bien de vieillir par rapport aux femmes?
Il est certain qu’ils ont plus de difficulté à vieillir que nous. Cela se fait de façon sournoise. Au début, tout va bien, et puis tout à coup, vers 65 ans, ils « cassent », accusent leur âge brutalement. Les femmes se préparent très tôt, font tout pour ralentir le vieillissement, y pensent. Les hommes, eux, en prennent conscience lorsqu’ils se rendent compte que leur virilité diminue. Ce qui leur fait peur.

–       Vous-même, quel est votre rapport à l’âge?
Je suis interpellée par la question depuis que j’ai réalisé que ce n’était pas les policiers et les pilotes d’avion qui rajeunissaient autour de moi, mais moi qui vieillissais! L’espérance de vie a été repoussée, je vis en Floride, une région qui rajeunit. De plus en plus de femmes ont recours à la chirurgie esthétique, et ce de plus en plus jeune. Nous avons toutes peur de ne plus séduire, moi comme les autres. Mais je ne suis pas prête à faire n’importe quoi pour autant.

–       Avez-vous vous aussi succombé aux sirènes de la chirurgie esthétique, pour laquelle vous êtes sans complaisance dans votre livre?
J’ai fait remonter mes paupières et je me fais faire de légères injections une ou deux fois par année. Pour moi, il est important de rester présentable, mais de garder un résultat très naturel. Ce qui me fait réagir, c’est l’exagération. Lorsqu’une femme a subi trois ou quatre liftings, nous sommes en pleine science-fiction! Regardez leurs visages… Ces interventions les transforment en profondeur et elles finissent par ne plus se ressembler. Vous imaginez les dégâts que cela peut provoquer, tant sur le plan physique que psychologique.

–       Vous consacrez d’ailleurs un chapitre de votre livre à l’angoisse de vieillir, cause des pires débordements.
Oui, car cette angoisse existe toujours, y compris après avoir subi un lifting. Nous vivons dans les apparences, dans l’obsession de la perfection, de la jeunesse éternelle. C’est ce qui pousse des filles très jeunes à passer par la chirurgie esthétique. Il faut vraiment prendre conscience de cette situation.

–       Si vous êtes sans pitié pour les marques proposant des « crèmes miracles » inutiles ou excessivement chères, vous ne tarissez pas d’éloges en revanche la gamme de cosmétiques de votre coauteur, le docteur Eric Dupont (NDLR: que l’on ne trouve pas en Suisse pour le moment). Une belle  publicité au passage…
En fait, en écrivant le chapitre sur l’inutilité de la plupart des crèmes anti-rides etc, je me suis dit qu’on allait certainement me demander ce que j’utilisais. Donc, j’ai cité ces produits. Ils le méritent. La plupart des cosmétiques ne contiennent que 2 à 3% de principes actifs, ce qui est bien trop peu pour obtenir un résultat quelconque. Celles dont je parle en contiennent entre 20 et 30%. Avec ce type de produits, nous sommes dans la cosmétologie, qui se rapproche de plus en plus du médicament. Je pense que nous allons de plus en plus aller vers ce genre de produits en nous éloignant de ces crèmes qui vendent du rêve. Aucune crème n’enlève les rides. Mais il y en a, et il y en aura de plus en plus, qui seront capables de prévenir et de ralentir le vieillissement.

–       Ce livre est très différent de ceux que vous avez écrits. Je pense notamment à « L’Anglais », dans lequel vous racontez votre rencontre avec votre mari actuel, plus jeune que vous. Qu’avez-vous appris en vous attaquant à cet ouvrage sur l’art de vieillir avec grâce?
Énormément de choses, particulièrement sur la peau. Il faut par exemple savoir qu’il ne faut plus subir de lifting après 70 ans, car la peau ne se remet pas de la même façon.

–       En dehors des crèmes dont vous parlez, quelle est votre façon d’aborder l’âge et de l’apprivoiser?
Selon moi, il faut cultiver sa vie intérieure. Je ne suis pas croyante, mais je suis « catholique sociologique »! Mais on peut avoir des sentiments de transcendance sans pour autant avoir la foi. Je me pose des questions, je pense que la vie est un don. Je crois qu’il toujours faut être en quête de sens. Ma mère m’a souvent raconté que, lorsque je suis née, j’étais comme morte, à tel point que l’on m’a ondoyée. Elle pleurait dans son lit lorsqu’une religieuse est venue lui demander ce qu’elle avait. Elle lui a répondu que j’allais mourir. La religieuse est allée me voir et est revenue lui dire: « Elle ne mourra pas, car elle a le goût de vivre dans les yeux ». J’aime la vie, j’aime les gens, je viens d’un milieu très populaire. Je n’ai aucun regret, je prends plaisir à manger, à boire. Je crois que lorsque nous nous acceptons tels que nous sommes, en profitant de la vie, tout devient plus simple! Vous parliez de ma rencontre avec mon mari. Je pense que mon véritable lifting au quotidien, c’est lui! 

Martine Bernier

– « Vieillir avec grâce – Rester jeune à tout prix ou vivre pleinement son âge? », Denise Bombardier, avec la collaboration d’Eric Dupont, docteur en physiologie-endocrinologie, les  Editions de l’Homme

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