Pierre Arditi: Je suis un enfant du bitume

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Je l’ai rencontré à Grenoble, voici trois ans, alors qu’il était en tournée. Accessible et aimable, Pierre Arditi a accepté de se prêter au jeu des questions pour un hebdomadaire romand axé sur les loisirs et l’environnement. Né à Paris, l’acteur a, avec la nature, un rapport occasionnel mais respectueux. À quelques jours de son arrivée en Suisse, il révèle un côté méconnu de sa personnalité.

Salon d’un hôtel de Grenoble. Pierre Arditi apparaît. Courtois, disponible, doté d’une intelligence percutante, il parle sans se faire prier de la tournée qui le mènera dans le canton de Vaud au mois de mai. « Lunes de Miel », où il partage l’affiche avec son épouse Evelyne Bouix, propose un scénario vaudevillesque. Un homme et une femme, autrefois mariés et passionnément amoureux, découvrent qu’ils séjournent dans le même hôtel alors qu’ils sont chacun en lune de miel avec leurs nouveaux conjoints. Une comédie qu’accueillera, en mai, le Théâtre du Jorat.

CAMPAGNE MAL-AIMEE
Lorsqu’il est en tournée, le comédien reste plusieurs jours dans la même ville. Une bonne occasion, pour ce pur Parisien, de renouer avec la province française. « Je suis né à Paris où j’ai vécu dans un quartier proche du jardin du Luxembourg. Je suis un véritable enfant du bitume. Pendant très longtemps, j’ai même détesté la campagne. Quand j’étais enfant, mes parents m’y avaient placé pour un séjour. Dans mon esprit, la campagne est devenue synonyme de séparation, de mort. Il a fallu que j’attende d’avoir 40 ans pour me mettre à l’aimer réellement. Mais la ville n’est pas dénuée de nature. Le cycle des saisons s’observe aux arbres, un peu trop rares, c’est vrai, que l’on y rencontre. Juste après avoir terminé mes cours de théâtre, j’ai travaillé en province, plutôt que d’attendre des propositions à Paris. À Marseille, j’ai apprécié la mer. Et à Lyon, il ne fallait pas faire beaucoup de chemin pour sortir de la ville. Ce qui me changeait de Paris où, pour la quitter, il faut passer par la périphérie, puis par la périphérie de la périphérie! »

BATAILLON DE CHATS
Si la nature est réellement rentrée dans la vie de l’acteur lorsqu’il a atteint l’âge adulte, les animaux, eux, ont trouvé plus tôt leur place dans sa vie. « A l’époque, quelqu’un a offert un chat à la personne avec qui je vivais. Un siamois colour point, très mignon. De fil en aiguille, nous avons fini par en avoir treize, dont beaucoup étaient des chats de gouttière. À part quelques petites anicroches de temps en temps, tout ce petit monde s’entendait très bien. Nous en avons placés, peu à peu, chez des personnes qui les adoraient. L’un d’eux s’est ainsi retrouvé à l’Hôtel des Invalides. Il griffait les fauteuils, se pendait aux rideaux et faisait toutes les bêtises possibles. Mais son nouveau propriétaire le laissait tout faire, et le chat a régné en souverain sur son nouveau domaine. »

SISSI IMPERATRICE
Plus tard, avec son épouse, Evelyne Bouix, qui a toujours eu des chiens, Pierre Arditi adopte Sissi, une chienne labrador. Celle-ci vit dans la maison que le couple possédait alors dans le Midi de la France. « Nous nous y rendions très souvent. À chaque fois, c’était la fête! Elle dormait dans notre chambre, nous suivait partout… C’était une chienne merveilleuse. De temps en temps, quand elle nous manquait trop, nous la ramenions à Paris. Elle était heureuse, mais nous sentions qu’elle manquait d’espace pour courir. Elle est morte à l’âge de onze ans. Ça nous a beaucoup affectés, ma femme et moi. Nous nous étions attaché à elle comme à un enfant. Nous n’avons pas repris de chien ensuite. Parce que nous ne sommes pas prêts à revivre un tel chagrin. »

ANIMAUX HUMANISES
Si l’acteur estime qu’il se ressource en pratiquant son métier, il aime également se rendre avec sa femme dans leur maison de Ramatuelle. Il décrit la vue sur la Méditerranée, le panorama presque vierge de fils électriques, le paysage qui rappelle celui de la Toscane, avec la mer en toile de fond… « Malheureusement, je pense que nous allons vendre la maison. J’ai trop de travail. Nous avons moins de temps pour y aller. »
Dès 1993, Pierre Arditi prête sa voix grave aux « Chroniques de la Terre Sauvage », une série de documentaires dont chaque épisode, scénarisé, se déroule sur un continent différent.  » Pour la première fois, on prêtait des émotions aux animaux. Cela les humanisait et les rendait très attachants. Ces documentaires ont remporté un succès fou, dont on me parle encore aujourd’hui. »

« OGM: PRUDENCE! »
En 2003, soucieux de son environnement, le comédien a accepté de se joindre à un collectif regroupant des artistes, des scientifiques, des élus et d’autres citoyens. Ceux-ci, par le biais d’une pétition, dénonçaient notamment les disséminations d’OGM (Organismes Génétiquement Modifiés) dans l’environnement. « Je ne suis pas contre les recherches en la matière. J’estime qu’il faut soutenir le progrès, et je dénonce ceux qui s’attaquent aux laboratoires. Ces recherches contribueront peut-être un jour à améliorer le problème de la faim dans le monde. Mais je suis contre la culture des OGM dans des champs, parce que nous ne savons pas vraiment quels risques peuvent en découler. Même si je ne suis pas toujours d’accord avec les moyens utilisés par les militants anti-OGM, j’estime que leur action est nécessaire. »

Aujourd’hui, le comédien s’apprête à retrouver le public Suisse avec plaisir:  » J’aime travailler dans votre pays. Beaucoup de Suisses viennent me voir lorsque je joue à Paris, également. Ça a toujours été un public épatant: délicieux, bienveillant, intelligent et vif! »

Martine Bernier

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