Elle s’appelait Scotty…

Ma petite chienne Scotty m’a quittée ce matin…
Et je ne me remets pas d’avoir dû, pour la deuxième fois de ma vie, prendre la décision de vie ou de mort sur un petit être vivant.
Hier soir, elle jouait encore, me taquinait.
Et puis, dans la nuit, une crise, à nouveau silencieuse.
Quand elle allait mal, elle ne gémissait pas, ne criait pas, ne faisait pas un bruit.
Je n’ai rien entendu.
Elle était sous médicaments, je pensais pouvoir être tranquille.
Mais ce matin, elle n’est pas venue à ma rencontre.
Je l’ai retrouvée dans mon bureau, dans l’un de ses paniers, couchée mais appuyée sur ses pattes avant, comme si elle était prête à courir vers moi.
Elle avait renversé la corbeille à papiers. J’ai vu aussi qu’elle s’était soulagée dans la maison.
C’est là que j’ai compris qu’il s’était passé quelque chose.

J’ai été préparer son repas du matin.
Elle ne venait pas, elle qui était si gourmande.
Je suis retournée dans le bureau, elle n’avait pas bougé.
J’ai réalisé qu’elle ne pouvait plus se lever… ses pattes arrières ne répondaient plus.

J’ai su que ce jour serait le dernier de notre vie à deux.
J’ai appelé Eric, puis le vétérinaire qui m’a fixé un rendez-vous matinal.
J’ai installé Scotty dans son panier le plus confortable et je l’ai prise sur le canapé, auprès de moi.
Je l’ai nourrie à la main.
Ses croquettes préférées et un os comme elle les aimait.
Elle me regardait, très calmement.
Et je lui ai parlé, parlé…
Je lui ai dit que, sans elle, je n’aurais probablement pas survécu à la dureté de ces derniers mois.
Je lui ai dit combien je tenais à elle, et le désespoir que je ressentais à ne rien pouvoir faire pour la soigner vraiment.
Je lui ai reparlé de notre vie dans ma Terre de Sel, des souvenirs qu’elle y a laissés.
Ses oreilles bougeaient lorsque je prononçais certains mots, certains noms.
Je l’ai cajolée, remerciée, gâtée.

Puis Eric est arrivé.
Nous avons parlé un peu et nous sommes partis.
Arrivés chez le vétérinaire, la situation a été clairement posée.
Soit je la ré-emmenais chez le spécialiste en neurologie et nous refaisions tous les examens, sans doute inutilement, soit nous attendions quelques jours ainsi, pour que je m’habitue à la décision à prendre, soit nous prenions la décision de l’endormir.
Il a précisé que, selon lui, nous étions entrés dans un processus qui ne verrait pas d’échéance heureuse.

Eric était d’avis d’attendre. Par pour ma chienne, mais pour moi. Car, vu tout ce que je viens de vivre, il n’était pas sûr que je tienne le choc.
J’ai réfléchi…
S’habitue-t-on vraiment à savoir qu’il va falloir euthanasier son chien? Peut-on se préparer? Je ne pense pas.
Je la regardais. Ses pattes se dérobaient sous elle.
J’avais envie de lui dire: « Tu sais, je ne conçois pas ma vie sans toi. Tu es une petite présence si précieuse… Mais toi, quelle est ta vie aujourd’hui? Toi qui aimais tant courir, fouiner, jouer… Que dois-je faire, que souhaites-tu? Dois-je te laisser ainsi? Ou te permettre de t’endormir? Mais moi, comment vais-je tenir sans toi? »

Tous ceux qui ont un jour eu à prendre cette décision le savent: c’est infernal.
Infernal de regarder son chien bien vivant et de se dire que dans quelques minutes il ne sera plus là.
Parce que nous en avons décidé ainsi.
Pourtant, je l’ai fait.
Parce que le processus de destruction de son système nerveux était irréversible.
Elle s’est endormie dans mes bras, sans comprendre ce qui lui arrivait.
Je suis restée là à l’embrasser.
Puis je suis partie.

Rentrer dans l’appartement sans elle…
Le vide qu’elle laisse est épouvantable.
Je n’arrive même plus à décrire ce que je ressens.
Je la vois partout.
On me dira que ce n’était qu’un chien.
Oui… mais j’ai mal, très mal.
Scotty était un merveilleux petit chien, espiègle et émouvant.

Maintenant, je vais me taire.
Par respect pour quelqu’un qui, quelque part, a plus mal que moi.

Martine Bernier

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