La valise

Dès que Pomme voit réapparaître une valise dans l’appartement, elle sait que quelque chose va se passer, qui ne va pas forcément lui plaire.
Pour la troisième fois en un mois, l’objet du délit a retrouvé sa place dans un coin de l’appartement où elle attend que je la remplisse pour le prochain et imminent petit départ.
Mon Havanais de bichon tourne autour de la valise, se dresse sur ses pattes arrières pour voir ce que j’y mets, vient me voir et pose sa patte sur mon bras en fixant son regard noisette dans le mien.
Comme elle le fait quand elle a besoin de me parler d’un sujet grave.
Elle sait que quand je prépare ma valise, je prépare systématiquement un deuxième sac.
Le sien qui, elle, dans ces cas-là, part en « colo » de son côté.

Mon dernier départ est trop récent pour qu’elle soit à l’aise face à ces nouveaux préparatifs.
Ce matin, donc, après avoir inspecté la valise qui se remplit lentement au fil de mon humeur, elle est venue me retrouver dans mon bureau, c’est dressée contre ma chaise, a posé sa patte sur moi, et a poussé un petit gémissement.
J’ai arrêté d’écrire pour accepter la conversation:

– Oui? Quelque chose ne va pas? Ah je vois… la valise.

Elle penchait la tête de gauche à droite, comme si elle cherchait à comprendre ce que je lui expliquais.
Je l’ai caressée, lui ai gratouillé les oreilles et me suis penchée vers elle.
Elle s’est empressée de me gratifier de quelques chaleureux coups de langue.
Ce chien me fait fondre!

– Ne t’en fais pas: cette fois, tu pars avec moi. Va préparer ton sac: nous partons demain soir. Et il te faut des affaires pour plusieurs jours!

J’ai repris le fil de mon texte lorsqu’elle est revenue me voir.
Elle avait dans la gueule son dernier jouet en date: un mouton tout mou qu’elle aime presque autant que son Monsieur Poulet, si j’en juge par le traitement qu’elle lui fait subir.
Je l’ai regardée perplexe.
Elle ne semblait pas vouloir jouer.
Mon travail était pressant, je n’ai pas pu lui accorder beaucoup de temps.
Qui sait, peut-être voulait-elle me demander où était son sac pour qu’elle puisse y entasser ses effets personnels?
Ciel, mon chien est un génie!

Martine Bernier

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