L’ami de mon père, Résistant…

J’ai toujours été impressionnée par le mot « Résistant », par ce qu’il implique.
En apprenant la mort de Raymond Aubrac, cette semaine, j’ai repensé à une personne que je n’ai pas connue, mais qui fait pourtant partie de ma vie.

Lorsque mon père était jeune homme, il avait un ami, Raymond Werll.
Ils allaient ensemble à l’Athénée, partageaient une amitié forte et solide.
Puis, la guerre est arrivée.
Raymond s’est engagé dans la Résistance, en Belgique.
Le reste, c’est mon père qui me l’a raconté plusieurs fois, lorsque j’étais enfant.
Un jour, les Allemands ont encerclé l’endroit où se trouvait le jeune homme.
Pour ne pas risquer de dénoncer ses camarades sous la torture, celui-ci s’est suicidé.
Il avait, je crois, 23 ou 24 ans.
Toute sa vie, mon père a porté en lui le chagrin d’avoir perdu son ami.
En hommage, il a donné son prénom à son premier fils.
Puis il est mort lui aussi, trop jeune.

Il y a quelques semaines, son frère, mon Parrain, m’a fait parvenir une photo.
Il avait rencontré une personne qui connaissait mon père.
Ce monsieur a cherché dans ses trésors, et a retrouvé une photo de classe où posent des jeunes gens, parmi lesquels les deux inséparables: Paul et Raymond.
Je les ai regardés  à la loupe, émue de découvrir le visage juvénile de mon père et son ami dont l’on devine à peine les traits.
Pour moi, le courage avait désormais un visage.

Cet été, je ferai un saut de puce à Bruxelles.
Depuis 1981, je n’y suis retournée qu’une fois.
Je sais déjà que je n’y trouverai plus les tombes de mes parents.
Mais mon parrain, mon père de coeur, m’accompagnera sur deux tombes qui n’ont pas été enlevées.
Celle de mon grand-père paternel et celle de Raymond Werll.
L’un a été ancien combattant, l’autre Résistant.

Martine Bernier 

par

2 réflexions sur “L’ami de mon père, Résistant…”

  1. Dominique Rougier

    C’est touchant . J’ai appris tardivement que mes deux grands-pères ont été héroïques dans des périodes où le mot courage est bien faible pour définir certains engagements. Mon grand-père maternel André Mercier,était cheminot ,en 39-40 de ceux qui ,entre autres bravoures,traversaient les villes de nuit,en armes,pour faire sauter les trains ennemis. Mon grand-père paternel ,Bathuel Rougier ,commandant des pièces d’artilleries en 14-18 a été décoré pour avoir stoppée l’avance ennemie, et probablement épargnées de nombreuses vies. Je les ai très peu connus ,mais je comprends à présent que le calme et la solidité de ces deux hommes renfermaient probablement de terribles souvenirs.

  2. Ces souvenirs me touchent beaucoup. Lorsque nous parlons de ces personnes, nous leur rendons hommage, nous ne les oublions pas. C’est important…

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