Kim et… Jurassic World

Jurassic-World

Hier, c’était le « jour de Kim », ou plutôt l’après-midi que nous lui consacrons chaque mois.
Nous comptions l’emmener au cinéma, sans trop savoir quels films étaient proposés.
A l’arrivée, Kim regarde un immense affiche et lance: « Les Mignons! C’est chouette, ça!!! »
Soupir de mon Capitaine qui regarde avec un air désespéré les images de ces petits bonshommes jaunes en salopettes bleues.
Le message est passé, je commence la phase de négociations:
– Tu sais, je crois que Bruno n’a pas trop envie de voir ce film-là. Sinon, il y aurait bien celui dont je t’ai parlé, tu te souviens?
– Oui, celui où on entre dans la tête des personnages et où on voit ce qu’ils pensent…
– C’est ça. Il a été primé, je crois. C’est un bon film…
Je veux parler du dessin animé « Vice-versa ».
Kim opine du chef, mais je sens bien qu’il n’est pas au sommet de son enthousiasme.
Quant à Celui qui m’accompagne, il se résigne d’un air maussade.
Nous prenons place dans la petite file qui nous mène à la caisse.
Et là, parmi tous les titres proposés je vois « Jurassic World ».
Kim l’a vu aussi et je vois bien que ses yeux brillent.
Mais quand même… il n’aura que neuf ans le mois prochain.
Est-ce qu’il ne va pas être traumatisé par ces bestioles effrayantes dégustant les  humains comme des biscuits apéritif?
– Hum… il y aurait bien « Jurassic World »…
– Oh oui!!!!
Il me regarde avec le regard brillant.
Mais je doute encore.
– Tu sais, ce n’est pas vraiment pour les enfants… Tu risques d’avoir peur…
– Mais non! J’ai déjà vu tous les autres! Et puis j’ai vu aussi tous les Terminator, Star Wars…
– Ah bon??? Tu as vu tout ça??
– Oui! Et je n’ai pas eu peur!
– Bon… va demander à Bruno s’il préfère voir ce film-ci. S’il est d’accord, nous irons.
Je les regarde discuter du coin de l’oeil.
Visiblement, mon Capitaine est nettement plus séduit par les carnivores belliqueux revenus du passé que par un dessin animé, aussi bon soit-il.
Affaire conclue, je prends les places, les pop-corn du petit et son coca (« vert, s’il te plaît »).
Avant que le film ne débute, Kim, qui trépigne d’impatience, m’explique:
– Quand j’ai peur, je transpire.
– OK. Si je vois une petite flaque par terre, je te sors de la salle!
Il rit… et le film commence.
J’ai envie de dire que s’il est parti pour devenir  un grand classique du genre, il est sans surprise.
Un parc d’attraction dédié aux animaux préhistoriques sur une île, deux enfants qui vont le visiter sur l’invitation de leur tante responsable des lieux, un immense dinosaure créé en laboratoire et génétiquement modifié, un beau héros hyper courageux, un vilain qui se fera croquer avant la fin (il y a une justice!), et une attaque de l’horrible bestiole et de ses sbires.
C’est bien fait et prévisible.
Pour Kim, c’est une toute autre chanson.
Il est hyper content, commente chaque scène tandis que je m’efforce de modérer son enthousiasme pour ne pas qu’il déranger les autres spectateurs.
Pendant les scènes trop dures, je m’inquiète:
– Tu as peur?
– Non, non… je suis juste stressé.

Je le regarde: il est effrayé et cela se voit.
– Tu sais que ce sont des images de synthèse, n’est-ce pas? Tout ce que tu vois là n’existe pas ou… juste en silicone!
– Oui, oui…
Il sourit et se replonge dans le film.
A la sortie, il est tellement ravi que je ne regrette pas le choix du film.
Mon Capitaine s’est laissé prendre par l’histoire lui aussi.
Quant à moi, j’ai fait ma BA et j’avoue que si ce n’est pas ce que j’aurais préféré voir, je ne me suis pas ennuyée.
Dans l’après-midi, je pose la question à Kim:
– Mais, entre un film avec des personnages réels et un dessin animé, que préfères-tu?
– Le vrai!!!

J’ai compris.
Le message est passé: il grandit…
A quelques détails près.
Dans la voiture,nous discutons informatique, et  il regarde les cartes d’animaux que je lui ai apportées.
– Oh… un goéland-lapin.
– Pardon? Je ne connais pas ce genre d’oiseau! Ca existe vraiment?
– Oui!!
– Montre-moi l’image?
Il me la passe et je découvre… un lagopède alpin.
J’éclate de rire en la lui rendant:
– Kim… relis son nom, doucement.
Il s’exécute une première fois: lagopède lapin.
– Non…. lis mieux…
– Lagopède alpin.
– Voilà. Tu es sûr que le film ne t’a pas déstabilisé?

Martine Bernier

 

 

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